Guillaume Adjutor Provost. Ce qu'il restera de communauté à l'œuvre

Depuis une dizaine d’années, l’artiste, commissaire et éducateur Guillaume Adjutor Provost développe une pratique plurielle axée sur la mise en commun de l’expérience individuelle par le bais de collaborations diverses et l’exploration d’espaces d’échange alternatifs hérités de la contre-culture. À travers ses œuvres, ses projets d’exposition et ses textes, il cultive une démarche expérimentale, toujours en dialogue avec d’autres, que nous avons voulu prolonger dans ce travail d’écriture à quatre mains. Au cœur de l’alliance se trouvent les procédés d’expression qui nous lient le verbal, le non verbal et même l’indicible , qui permettent aux âmes sœurs, activistes, travailleurs.euses, réfractaires et excentriques, de se trouver, se reconnaître et s’unir, de faire communauté pour mieux se soutenir. La méthodologie déployée par Provost implique en effet de donner corps à la création et au reste ensemble, d’œuvrer collectivement à rendre intelligible une pratique éthique aussi bien qu’artistique dans l’espoir d’exprimer quelques sentiments partagés. Allant des corps de travail aux communautés de soin, en passant par les dérives créatives et exutoires libérateurs, ses préoccupations sociopolitiques l’amènent à imaginer des formes parallèles d’existence collective qui ravivent les utopies émancipatoires de notre histoire culturelle récente.

 

PUNCH-IN, au boulot

 

Le fait qu’une journée de travail sera toujours suivie d’une autre, puis d’une autre encore s’impose comme une rare certitude. Le « Ne travaillez jamais » d’un jeune Guy Debord, marqué à la craie sur un mur de la rue de Seine en 1953 puis repris par le mouvement de Mai 68, se sera heurté à une part irréductible de réalité. Et le labeur, loin d’avoir disparu, sera plutôt devenu diffus, quasi permanent et nous collant sans cesse à la peau. Comme le note le critique d’art et historien Sven Lütticken dans son essai « Liberating Laziness Chronopolitical Remarks » paru dans l’ouvrage collectif Art in the Periphery of the Center (Sternberg Press, 2015), l’instance la plus remarquable des politiques temporelles (chronopolitique) aura sûrement été la lutte des associations de travailleurs.euses pour des heures de travail réduites. Ces efforts communs ont mené à la libération de temps de loisir et de vacances pour la classe ouvrière qui accède alors au statut de « classe moyenne » et délaisse au passage une part de la solidarité syndicale qui lui aura permis de « gagner » son combat. Aujourd’hui, une économie mondialisée génère une interdépendance des ouvriers.ères et des nomades numériques tout en les maintenant à distance les un.e.s des autres, et donne l’impression que le sommeil, la paresse et l’ennui se sont dissipés, évacués par manque de temps.

 

Provost considère d’un œil critique cette progression de la société ouvrière à l’ère post-fordiste où le goût de l’oisiveté reste à reconquérir et le temps devient un luxe précieux. Dans une demeure où la chambre à coucher et l’atelier empiètent l’un sur l’autre, l’artiste est tenté de se demander si son existence est plus enviable qu’un destin ouvrier, si la précarité et l’incertitude du milieu culturel valent réellement mieux que la rigidité d’un emploi salarié. Sans préciosité, il y a parfois lieu de se questionner. Les gestes codés que l’on reproduit dans un contexte professionnel donné sont l’occasion de réfléchir aux différents registres de l’existence, ainsi que l’évoque cet extrait du texte « Le passager », tiré du recueil Bad Boys (Triptyque, 2019), où Provost relate sa propre expérience de travailleur saisonnier : « On récupère des gants de caoutchouc pour compléter notre équipement : pantalon de toile, chemise en coton brossé, dossard fluo, bottes trop grandes ou trop petites. La job est expliquée en une seule expiration […] Je suis un globule blanc entre la 204, la carrière, la grande route et la plantation de pins, où je commence la guérison. »

 

Qu’importe la nature de la tâche à accomplir, l’artiste trouve matière à création dans les collections d’objets, d’accessoires, de symboles et d’icônes qui donnent forme au labeur et permettent aux communautés de travailleurs.euses d’échanger entre elles, de collaborer. L’une des pièces centrales de l’exposition Bonne Fortune présentée en 2016 au Centre Clark, On avait tellement hâte de se rencontrer qu’on a botché nos langages, croise précisément l’iconographie de l’industrie avec celle de la distraction. Une série de bleus de travail sont suspendus à quelques supports métalliques disposés sur le plancher et au-dessus de l’entrée de la galerie. L’accrochage permet de bien observer chaque habit, presque comme s’il s’agissait d’un vêtement de haute couture. Cette pratique du réemploi et de la revalorisation vestimentaire, Provost l’a connue dès son enfance lorsque ses parents achetaient, pour habiller leurs trois fils, des vestes de travail de seconde main aux revendeurs d’uniformes qui sillonnaient leur coin de pays. Sous l’encolure des chemises exposées par l’artiste sont cousues des impressions de cartes QSL imagées que s’échangeaient les camionneurs qui parcouraient les routes du Québec entre 1970 et 1990 pour contrer l’isolement. Ces cartes, en plus d’indiquer les fréquences radio du transporteur routier, étaient illustrées de manière un peu grivoise, voire explicitement sexuelle, afin de marquer les esprits et de faire sourire les confrères avec leurs « langages botchés ». L’association de la carte QSL avec la tenue d’ouvrier standard fait ressortir la tension entre uniformité et individualité, convention et distinction qui sous-tend l’idée de « code vestimentaire » : un assemblage de réglementations et d’usages permettant la rencontre, la reconnaissance et souvent l’expression d’une fierté des professionnel.le.s d’un même secteur. Au mur, trois interprétations psychédéliques du logo de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) encadrent l’espace où vient performer (lire, fumer, pleurer, parler) l’artiste et alliée Sarah Chouinard-Poirier. Inspirée par le documentaire 5 pieds 2 80,000 lbs de Nathalie Trépanier, la performance BREAK! marque un temps de pause dans l’exposition et met en dialogue la proposition de Provost avec la part féminine du camionnage. « Seek you », je te cherche, peut-on lire sur la camisole de la performeuse; une allusion à la solitude vécue par ces ambassadrices de la route à mesure que défilent les kilomètres.

 

Le code vestimentaire est en soi un langage visuel, et le transgresser comme y adhérer recèle un fort potentiel expressif. C’est ce que Provost met en évidence, tant avec les bleus de travail de l’exposition Bonne fortune qu’avec les pantalons larges et bariolés marqués des lettres du Service de police de la Ville de Montréal qui composent l’installation Cent-trente-trois présentée à Lyon en 2018. Le détournement et la réappropriation de ces habits devenus presque clownesques suggèrent une force d’autodétermination intrinsèque à la contre-culture, où l’habillement chavire aisément du côté du déguisement. Dans le cas examiné par Provost, il se fait moyen de pression pour rendre visible les revendications d’un corps professionnel : les policiers montréalais ne pouvant légalement entrer en grève, la modification de leur uniforme, dans le cadre de la contestation initiée en 2014, était une manière à la fois de manifester et de contourner cet interdit tout en déployant un nouvel espace de liberté individuelle. Le fait de se fixer soi-même, par ses choix et ses actes, permet également de fluidifier son identité en s’adaptant à différents contextes sociaux, en défiant la norme par une « pratique de la radicale souplesse », pour reprendre une expression de l’artiste Marie-Michèle Beaudoin, qui n’est pas sans rappeler la fluidité du genre et la force subversive de la flexibilité. Mais on pourra également se faire prendre au jeu du plus souple, en restant coincé dans une position intenable. Comme l’indique un grand manufacturier d’électronique dans un slogan tout désigné pour l’époque, « le monde est notre bureau », mais celui-ci est partagé et ne nous appartient pas réellement.

 

PUNCH-OUT, à la recherche du temps libéré

 

Si pour certain.e.s le travail est une échappatoire, d’autres chercheraient plutôt à tout prix à y échapper. À défaut de pouvoir s’en défaire tout à fait, rien n’empêche de s’en distancier un peu par la divagation, l’indolence récalcitrante. Chez Guillaume Adjutor Provost, nous avons vu quelques exemples de dérives créatives à l’œuvre avec les cartes QSL illustrées, les pantalons aux couleurs éclatantes et l’iconographie syndicale expérimentale, mais que se passe-t-il le soir venu, une fois le travail accompli ? La vie ne fait que commencer. René Char parlait en 1981 du « providentiel [qui accourt], pour jouer de bonheur avant le retour des craintes ! ». Le temps ne s’applique plus, on laisse place à l’inattendu, au surgissement. Il s’agit ici de profiter du temps libéré, au sens que lui ont donné Pierre Huyghe et ses comparses de l’art relationnel, avec qui il forme en 1995 l’Association des Temps Libérés, rassemblement voué au développement de « temps improductifs », à « une réflexion sur les temps libres » et à « l’élaboration d’une société sans travail ». Contrairement aux temps libres, prescrits par la société de consommation pour sortir du rythme de travail et se ressourcer avant d’avoir à y retourner, le temps libéré constitue un acte en soi, qui permet de se réapproprier l’horloge et le chronomètre de manière à résister aux forces de la productivité, de trouver et chérir des espaces-temps préservés.  

 

Les récits périphériques et lieux alternatifs qui ont contribué à former l’inconscient collectif sont excavés par Provost, qui porte un attachement particulier aux visées utopistes, révolutionnaires et contre-culturelles qui marquèrent les décennies 1960 et 1970. Dans les pratiques artistiques contemporaines, cette nostalgie de l’avant-garde se traduit par une résurgence des enjeux et des thèmes hérités de l’ère hippie : conscience écologique, auto-suffisance et auto-gestion, pratiques pédagogiques et sociales, média libres, indépendants et ouverts, culture en réseau, design centré sur l’humain, entre autres. Comme le suggère le commissaire Andrew Blauvelt dans le catalogue de l’exposition majeure Hippie Modernism : The Struggle for Utopia (Walker Art Center, 2015), bien que nombre de ces réflexions demeurent irrésolues, les expérimentations radicales ainsi que les propositions utopiques qui s’en dégagent planent toujours dans l’imaginaire culturel contemporain par leur habileté à produire des futurs alternatifs. Blauvelt s’appuie sur les mots du philosophe et sociologue Herbert Marcuse, qui faisait mention en 1969, dans An Essay on Liberation, d’une « nouvelle sensibilité »« la haine de la jeunesse éclate en rires et en chansons, reliant la barricade au plancher de danse, les jeux de l’amour et l’héroïsme » (traduction libre des auteur.e.s). L’art joue d’ailleurs un rôle essentiel dans la pensée marcusienne, notamment comme véhicule de transformation de la société qui engage une expérience du corps et de l’âme libérée de la force du travail. C’est dans ce rapport entre les conditions d’existence normatives du monde actuel et les possibilités d’évasion et de résistance mises en place par la contre-culture que se positionne la démarche de Provost.

 

Pouvant évoquer l’expérimentation introspective que décrit Marcuse, le projet d’exposition Matériellement rien, potentiellement tout réactive les souvenirs brumeux du club Nuit Magique qui marqua la vie nocturne montréalaise au tournant des années 1970 et 1980. Le titre de l’exposition, tout comme les objets alambiqués qu’elle accueille, tente de nous mettre à distance du monde matériel grâce à une triangulation qui lie la substance psychoactive, le geste d’écriture et la communauté. Y sont évoqués Spiros Zafiris, Leonard Cohen, Henry Moscovitch ou encore Lewis Furey, qui se rendaient au club en quête de plaisirs éphémères, échangeant poudres et papiers (à rouler, ou annotés de l’ébauche d’un poème ou d’une chanson). Un t-shirt en polyester rose tout en transparence témoigne de la libération des corps et des identités sexuelles qui pouvait survenir dans cet endroit culte, comme dans d’autres tiers-lieux : ni espace de travail, ni domicile, mais certainement lieu d’intensités vécues. Sur une table reproduisant les contours du conjunctio spirituum, figure angélique de l’union des sexes masculins et féminins, une collection de pipes modifiées sont disposées sur des chaussettes boudinées qui leur servent de reposoir, en attendant d’être ressaisies pour une bouffée dans un coin sombre du club, ou encore dans un Salon privé, titre de l’œuvre. À proximité, un siège en acier sert de porte-manteau à une veste piquée de plumes, près de laquelle est posé le recueil de poèmes Death of a Lady’s Man (1978) de Cohen, dont la couverture affiche la même figure des anges enlacés. Le titre, The Poetry, the Text, was Humans, porte à croire que Provost attribue aux relations humaines un statut poétique au-delà de l’écriture. Cette idée est reprise dans la série de dessins à la limite de l’abstraction qui orne les murs de citations des auteurs et artistes mentionnés précédemment, mais dont la graphie liquéfiée empêche la lisibilité du texte. Les mots, qui semblent avoir été tracés sur la surface embuée d’un miroir de salle de bain, subsistent uniquement dans la chaleur et la condensation qui se dégagent des corps à l’intérieur du club pour s’estomper au petit jour.

 

Apprendre à se lire au-delà du langage, grâce à l’intervention d’agents externes la psychanalyse, le tarot, les psychotropes, les amours et les amitiés , voilà un des axes principaux de la démarche de recherche-création développée par Provost. Cette intention est exprimée dans les mots que l’artiste adresse à son ami, collègue et sorcier Jamie Ross dans l’opuscule qui accompagne le projet Unscrew the locks from the doors! (Un sortilège de libération) (Verticale, 2018). Au cœur de ce texte intitulé Dans le monde où je veux vivre, il déclare que le climat politique actuel attise un besoin « capital de soigner les relations qui nous supportent et nous nourrissent » en chérissant une parole venue tout droit du cœur. En tant que lecteur, il aura envie de discuter de ce qu’il découvre, dans un cercle de lecture informel, à l’invitation d’un centre d’artistes ou dans un contexte académique, avec pairs et étudiant.e.s. Enseigner, transmettre et aider la relève, coopter ses proches sont des actions qui comptent pour l’artiste, malgré ce paradoxe tenace voulant que lorsqu’il dirige la lumière sur d’autres, on cherchera tout de même à en connaître la source ; l’hôte ou l’artiste-commissaire ne peut jamais s’effacer complètement. Les personnes qu’il aime habitent ses œuvres, et les témoins peuvent parfois s’attendre à recevoir des fragments d’un propos intime, extraits de journaux ou correspondances alors rendus publics.

 

Une alchimie des impressions entre en jeu dans la circulation de ces expériences individuelles et collectives. Provost aime imbiber la fibre et la pulpe d’encres et de teintures pour la part de hasard, voire de révélation, que peut comporter ce procédé. Le transfert direct entre la main, l’outil et la surface du papier rend possible une communication subconsciente, visible dans la récente exposition Chambre réverbérante à la Galerie Hugues Charbonneau. Les dessins de la série Untitled (flux), produits sous l’influence de l’autohypnose ou de la drogue douce, émanent d’une impulsion inopinée, d’un geste presque organique. Flux d’information inintelligible, hors langage, hors figuration, les traits qui composent cette série dessinent un portrait sans filtre de ce qui traverse l’artiste, de ce qui vient à lui intuitivement, telles ces bottes aperçues brièvement dans une publicité suggérée par un algorithme et qui, après avoir laissé une empreinte rétinienne et conceptuelle indélébile, se matérialisent de manière fantasmée dans les sculptures bottées Fée du Kapital (shift de jour) et Fée du Kapital (shift de nuit).

 

CRACK OPEN, enfin libres ?

 

À l’issue de trois années passées à développer sa pratique à la Fonderie Darling de Montréal, lieu caractéristique d’une redéfinition fertile des sites post-industriels, l’artiste nous plonge dans les interstices de sa psyché distillée avec l’exposition Vapeurs (2019). Au sol, des trilobites en résine s’imbibent d’alcools arrangés et d’infusions aux effets sédatifs, et semblent sortir d’un temps indéterminé, interminable, entre préhistoire et futur lointain. Un matelas est placé sur une scène, et au mur se trouvent ces images d’encres et d’acrylique sur aluminium gravé de la série Nous ne sommes déjà plus les mêmes (I-X) rappelant les tests standardisés par Hermann Rorschach censés révéler une part de notre inconscient. On en viendrait presque à s’allonger dans ce Laboratoire de performance pour s’abandonner à une séance d’introspection, une rêverie spéculative ou une intoxication volontaire. Dans cet espace sont possibles des exils intérieurs, seul ou à plusieurs, des dérives pouvant mener, en confiance, à un partage des expériences. Seulement, les réels échanges et la collaboration sincère nécessitent du temps, tout comme une psychanalyse aux effets tangibles. Il faut apprendre à se connaître, développer des modes de fonctionnement effectifs sur une période assez longue pour que quelque chose de vrai survienne ; apprivoiser aussi comment les fantasmes des un.e.s peuvent devenir le cauchemar des autres.

Une part essentielle de l’œuvre de Provost tient dans l’expression d’un certain souci de soi, la nécessité de prendre soin de nos corps et de nos esprits, en nous rappelant que la santé mentale et physique constituera toujours notre seul bien véritable. Notre force de travail, notre valeur résident aussi dans ce que nous savons et pouvons faire nous-mêmes ou avec l’aide de notre entourage immédiat, dans un partage de moyens visant à mieux contrecarrer la précarité. En l’absence d’assurance-emploi dans le milieu culturel, prendre soin devient un geste de résistance nécessaire, la création d’une communauté de care, un moyen de survie. Fidèle à ce procédé et attaché à toujours tisser de nouveaux liens, l’artiste ouvre encore à d’autres cette plus récente exposition, et laisse advenir gestes autonomes et situations inédites en présence d’un public jamais captif. Avec The Only Way To Know For Sure Is To Test Your Blood Sugar, Guillaume B.B., accompagnée d’Alegrìa Gobeil à l’écriture et de Jordan Torrès-Bussière à la musique, performe au printemps 2019 l’intoxication des corps fatigués, monitorés, endettés. Lorsqu’elle bande ses pieds en nous parlant d’une voix à peine amplifiée, les microphones agissant comme de petites perfusions, B.B. semble dire une part de notre fragilité et de notre force à toutes et à tous : « Des drogues – l’éventualité d’une grève – la saison des feux – aux bordures de tes parasites / … / Dans mon dos la pression / des spasmes m’empêche de respirer / je pense à la multitude à risque / … / Refusons de jouer au jeu prévu pour nous apaiser / … / tentons de conserver ce qui / reste de communauté en circulation. »

 

Un cycle se termine avec ce projet d’installation performative, dont les dispositifs meublent désormais l’appartement de l’artiste, nouveau laboratoire. Lorsque l’on tente d’imaginer où se situerait le travail de Guillaume Adjutor Provost dans dix ans, nous ne pouvons ignorer l’impact de ce changement d’espace de production, de vie, sur son processus créatif. D’ores et déjà, l’artiste semble raffiner la part matérielle de sa pratique pour favoriser une économie de moyens, des expérimentations sensorielles et psychiques et leurs traductions formelles. Serait-il possible que ces tendances à l’évasion soient liées à l’impact de la crise écologique sur nos modes d’existence, et contribuent à nourrir une envie de produire des mondes parallèles où trouver refuge ? Une tentative de préservation, donc, afin de distribuer le poids d’un épuisement chronique des ressources, individuelles et collectives, une circulation d’énergie qui pourrait nous aider à reprendre notre souffle, à sortir de nous-mêmes pour faire œuvre ensemble.